jeudi 15 août 2019

Olé, nouvel épisode, la bata multicolore

Nouveau projet, mais toujours dans le thème qui n'est cher. Il s'agit de la danseuse Flamenco Marina Pomares, d'après une photo du photographe Michel Renard (dont on peu voir l'original ici). La photo a été prise lors des répétions d'un tablao à Auch. La particularité de cette bata de cola (la robe à traîne) est le nombre important de volants (13 …) et le fait qu'elle soit multicolore …

Je commence par une recherche du cadrage que je veux obtenir (puisque je travaille sur un format raisin avec une marge de 1.5 cm sur chaque bord, caractéristique du papier Canson mi-teinte Touch). J'essaye de modifier la taille de l'image et son positionnement pour coller au mieux avec les lignes de cadrage classiques situées au nombre d'or des proportions en hauteur et largeur. J'essaye de faire correspondre les lignes de force du dessin avec ces axes pré-positionnés (ici l'axe vertical du corps passe au niveau de la ligne vertical au nombre d'or)


Je pars sur un papier Canson mi-Teinte Touch (comme souvent) format raisin couleur gris ardoise (c'est une couleur que j'aime bien et qui permet de bien faire ressortir la lumière par contraste). Premier jet avec la technique du rhodoïd (des vieilles couvertures transparentes de document) pour caller l'ensemble du dessin. Comme je me connais et que je vais commencer par le haut du dessin (ce qu'on fait souvent en pastel parce que les pigments sont soumis aux dures lois de la nature, y compris la gravité. Si on commence par le bas, les poussières de pigment du reste du dessin du dessus vont dégouliner sur la zone du bas et dégrader le dessin …). Bref, premier jet au crayon fusain, avec au préalable une grille de 10 cm de côté pour caller la photo originale et le dessin. J'ai également imprimé la photo à l'échelle du dessin pour y revenir.



Premier jet de pastel sec (Rembrandt). Je suis allé refaire mon stock de Terre de Sienne !


J'affine aux crayons pastel (Faber Castell). Honnêtement, je pense que j'ai passé 3 heures pour la narine et la bouche ...


On pose les cheveux. Ca permet de vérifier les contrastes avec la carnation. L'éclairage de la scène est (entre autre) rouge, dans des tons très chauds. De ce fait, j'ai très peu utilisé d'ombre naturelle pour le visage comme si ça avait été avec une lumière blanche. Les reflets rouges dans les cheveux rendent très bien de loin, mais quand on a le nez dessus lors du dessin, on a franchement des doutes … On peut aussi noter la traînée de pigment qui descend des cheveux, en lien avec la remarque de "pourquoi je commence à dessiner le haut" ...


Hop, mise en place du bras situé à droite (je suis gaucher alors je commence à dessiner ce qui est à droite pour ne pas me gêner par la suite). La marque qu'on voit sous les frous-frous de la manche correspondent à la position de ma main droite qui me sert de support pour poser ma main gauche pour dessiner. A ce stade, je me rends compte que j'aurais du mal à suivre l'exacte palette de couleur de la photo en ce qui concerne le choix des bleus ...


Je continue avec la partie dans l'ombre … on commence à voir apparaître des violets et des retours de lumière Terre de Sienne (qui correspondent à la lumière reflétée par le parquet qui est en bois)


Suite des ombres … le choix du violet semble bien fonctionner …


Jusqu'à ce que j'attaque la zone éclairée à partir de la taille, le choix du violet pour l'ombre ne me semblait pas complètement acquis, mais finalement, ça marche bien !


Pour le bras du haut, il faut tenir compte de l'éclairage rouge qui arrive directement sur le bras … à ce stade, j'ai fait des choix de couleurs que j'ai eu un peu de mal à assumer dans un premier temps et finalement, comme souvent, dès qu'on prend un peu de recul par rapport au dessin, on se dit que ce n'est pas si mal. Là, j'ai quand même fait côtoyer du rouge vermillon avec du bleu outremer (oui, le bleu outremer, c'est pas forcément foncé … le ciel est globalement bleu outremer)


Je descends un peu … les plis ne sont pas évident à représenter et pour le choix des couleurs, il n'y a pas de solution unique. J'ai repris souvent certains plis et fait apparaître des nuances plus turquoises  à certains endroits. A noter que l'ombre violette au niveau des fesses passe assez mal sur la photo.


J'attaque maintenant la partie coriace … les volants … il y a 9 volants sur l'avant de la robe et 13 sur l'arrière (le volant du haut étant en dentelle avec des petits pompons). Pour les volants dentelle, bleu clair et bleu moyen, le choix des couleurs a été assez simple. Au pire, j'ai mélangé deux couleurs.




Pour les volants bleus foncés, en revanche, ça a été beaucoup plus compliqué. J'utilise du pastel noir et du fusain naturel noir, plus différentes nuances de bleu de Prusse et de gris bleu, plus quelques nuances de violet et de bleu outremer (moyen) pour les parties qui reçoivent l'éclairage rouge … là, la couleur obtenue est plutôt un mélange de 6 ou 7 couleurs …




Pour la dernière série de volants, ceux-ci sont noirs. Mais bon, le noir, ce n'est jamais que du gris très foncé. Ou du bleu très foncé. Ou du rouge très foncé. Je fais un premier jet avec du pastel noir, du fusain naturel et une base de magenta très foncée. Ca donne l'impression de marcher ...


… mais je ne suis pas convaincu. J'ajoute du gris bleu foncé dès le lendemain avec du rouge foncé et du magenta foncé pour les zones de noir plus lumineux. Ca a l'air d'être mieux ! Ca me permettra de jouer sur l'éclairage car les volants noirs sur la partie avant de la robe ne recevant pas l'éclairage rouge, C'est surtout la couleur gris bleu foncé qui transparaîtra.


Le choix a l'air pertinent ...


Je pose ensuite le parquet et le fond (c'est assez rapide en fait de poser du parquet). Pour le fond, je fais tourner le dessin sur la planche pour que les dégoulinures de pigment ne passent pas sur le dessin. Ca n'empêche malheureusement pas quelques agglomérats de pigments noirs de se coller au reste du dessin. Je m'en débarrasse soit en reprenant la zone en question, soit en virant les petits agglomérats à la pointe de cure-dent.



Et voilà le dessin terminé et près à partir être encadré. Il ne me reste qu'à passer le fixatif !


Pour ce dessin, j'ai utilisé un nouvelle méthode qui consiste à utiliser massivement une tablette graphique pour avoir sous le nez en continu la zone que je dessine à l'échelle du dessin. Ca a été très pratique, notamment pour le dessin des volants car comme je le pressentais, le fait de commencé par le haut du dessin a amené tout le bas du dessin à être presque effacé quand j'y suis arrivé. J'ai donc redessiner les volants au fur et à mesure en me basant principalement sur les photos à la même échelle que sur les rhodoïds (qu'on a du mal à utiliser une fois qu'il y a du pigment plein le dessin).

C'est un dessin que j'ai fait assez vite (en gros, en un mois, mais la première semaine, j'ai bossé dessus en continu) ce qui est un changement par rapport aux dessins précédents ...


dimanche 12 mai 2019

Double portrait

Nouveau projet, dans un thème non flamenco, ou du moins pas directement. J'ai décidé de représenter une amie en train de brosser les dents de son fils à partir d'une photo faite par sa fille avec un téléphone portable. Je crois que ça s'appelle "une maternité", mais je ne suis plus trop sûr. Ce sera en tout cas la première fois que je représente deux personnes en interaction proche.

La photo est très belle (c'est ce qui m'a décidé à la reproduire en tableau), mais en contre jour, avec des couleurs un peu désaturée … donc il a fallut que je m'inscrive dans un vaste mouvement de libération de la palette chromatique …

Je vais travailler sur un format plus petit qu'habituellement, c'est à dire un format A3, sur du Canson mi-touch couleur cachou (beige …)

Je ne fais pas de dessin au carreau, mais je travaille directement au rhodoïd pour reporter la photo (imprimée à la taille du tableau final) sur le papier. Je travaille avec un crayon fusain. Même si c'est un peu triché, je me suis rendu compte que la précision de trait qu'on atteint avec cette technique n'est pas suffisante et qu'il faut quand même sans cesse revenir à la photo d'origine.



Premier jet de pastel, toujours au pastels secs Rembrandt.


Pour les cheveux, il s'agit d'un mélange de pastel sec noir et de fusain naturel. En effet, compte tenu de la structure granuleuse du papier, les pigments de pastels n'arrivent pas à rentrer complètement dans les anfractuosités de la structure du papier, alors que le fusain naturel y arrive. J'en profite pour découvrir qu'on ne dit pas "infractuosités" …



Je continue au pastel sel


Et je continue de continuer.


Et j'attaque la robe à rayures. Il faut réussir à donner le volume de la robe juste avec les aspects clairs ou foncés du tissu …


A ce stade, j'ai inversé des plis au niveau de la cuisse … (ce qui devrait être en relief est en creux) … ça sera corrigé par la suite.


Je rajoute les rayures blanches, qui sont ici bleu clair pour la plupart avec des touches de violet. Très peu de blanc est utilisé finalement pour les rayures.


Et hop, on met la texture de l'assise … J'en profite pour placer discrètement quelques nuances d'"ombre naturelle" dans le bas des rayures de la robes, on contact de l'assise. Ce qui donne un peu de vie à l'assise est la présence, dans certains plis, de coloris légèrement orangés ce qui casse l'aspect froid des autres ombres (faites en différentes nuances d'"ombre naturelle"). J'avais déjà expérimenté cette technique ici


… le mur et le rideau. On peut noter que j'ai modifié les couleurs claires des rayures au niveau du dessous de la cuisse pour avoir du reflet jaune du tissu de l'assise qui se noie dans le bleu clair.


On rajoute les fenêtres avec les rideaux vaporeux



Je rajoute ensuite la texture des cheveux, principalement aux crayons fusain Faber-Castell.

Je n'étais pas content du nez de la mère, donc j'ai repris modèle sur mon amie pour voir comment ça devait être, puis j'ai essayé de corriger de mémoire (exercice pas évident, sur une échelle de 4 à 11). J'ai aussi prolongé les zones sombres du fils à droite pour le cadrage final. J'ai aussi très légèrement remonté la partie externe de la paupière inférieure (peut-être de 0.5 mm) mais ça suffit pour rendre le regard plus souriant comme sur la photo d'origine.


Et au final, après quelques petites retouches supplémentaire, ça devrait donner quelque chose comme ça une fois encadré.

(collection particulière)


Et voilà … 

dimanche 13 janvier 2019

Olé, version mantón rouge

Après avoir repris les pastels, je reprends la plume pour présenter ici mon nouveau projet, toujours dans le thème du Flamenco. Il s'agit de Fuensanta "la Moneta", extraordinaire danseuse originaire de Granada, à partir d'une photo faite par Emiliano Artigas lors du festival de Flamenco de Rivesaltes, fin août 2018.

Il y a eu pas mal de temps depuis le projet précédent parce que j'étais parti sur une autre idée ... puis une autre idée ... pour finalement converger sur celle-ci ;)

Voici la photo d'origine et mon choix de cadrage ... contrairement aux dessins que j'ai faits jusqu'à présent où il y avait beaucoup de travail sur les visages, ce ne sera pas le cas dans la mesure où celui-ci est dans l'obscurité. Il n'y aura donc peu de travail de détail à ce niveau, mais beaucoup de chose sur les contrastes et leur absence.

Je pars (comme souvent) sur un Canson mi-Touch ... je pense qu'il est gris ardoise. J'applique la technique du carreau, en ayant fait des sorties imprimantes à l'échelle du dessin final. Contrairement à ce que je fais d'habitude avec des mesures à la règle pour reproduire au mieux les carreaux, je fais ça un peu plus naturellement ici, à l'œil ... Je dessine au crayon fusain.


... parce que de toutes façons, ensuite, j'utilise la technique du rhodoïd pour affiner le dessin.


Et c'est parti pour la mise en couleur, au pastel Rembrandt. J'utilise très peu les crayons pastell Faber-Castell car il y a au final très peu de détail, sauf dans le cheveux. Je commence déjà à chercher les nuances sombre en utilisant du fusain naturel qui vient se mêler aux pigments des pastels.



Je continue avec le haut de la robe et le bras avec la manche transparente. Je fais le bras un peu plus sombre que normalement (puisqu'il n'est pas exposé directement à la lumière) et je représente le voile de tissu noir au pastel noir (sur les bords) et au fusain naturel. Et là, je me rends compte de ma première boulette ... j'ai représenté ce que j'ai pris pour une queue de cheval ... en fait, ce sont des flecos sur les épaulettes ... là, vous allez me dire "hey, mais c'est quoi des flecos ?" ... très bonne question ! Ce sont les franges (petites ou grandes) qu'on retrouve sur les costumes et les accessoires de Flamenco. Ici, ils sont noirs et je les ai confondu avec les cheveux ...


Début du mantón rouge ... et là, vous allez me dire "hey, mais c'est quoi un mantón rouge ?". Et bien, c'est aussi une très bonne question ! un mantón rouge, c'est un mantón, mais rouge. Dis autrement, c'est un grand châle, mais rouge. Pour en avoir déjà utilisé en danse, c'est difficile à manier (surtout quand on est gaucher), c'est lourd et si vous vous demandiez si les bruits de capes dans les films de cape et d'épée ou de super héros DC Comics qui ont une batcave ne sont pas exagérés, sachez que non. Ca fait un bruit démentiel pour celui où celle qui le manipule. Mais à 3 m, on n'entend plus rien ...


Bref, je continue le mantón rouge ... si vous ne lisez qu'un bout de texte sur deux et que vous vous demandez de quoi je parle, relisez l'épisode de Batman ci-dessus.


Je continue ...


Et j'attaque le bas de la robe, tout du moins, la partie au-devant de laquelle il y aura les flecos du mantón (ultimate combo !)


Flecos du mantón que voilà ... et là, c'est une première pour moi : un premier plan par-dessus un arrière plan déjà dessiné ... j'ai donc passé un coup de fixatif en bombe sur la partie bleu de la robe avant d'attaquer les flecos. Alors, un point que j'avais déjà noté avec le bleu, c'est que certains pigments ont tendance à métalliser sous l'effet de l'échauffement du pastel sur le papier. De ce fait, le dessin devient plus lisse et accroche moins le pigments suivants ... c'est un peu le cas ici où j'ai dû bien batailler pour que mes pastels rouges accrochent. D'autre part, les pigments rouges (et jaunes) sont assez peu couvrants ... donc la satisfaction que j'éprouve par rapport à cette zone reste assez modérée.


Hop, la suite de la robe et ses volants. Il s'agit d'une Bata de Cola, c'est à dire une robe avec une traîne qui nécessite une technique de danse particulière.


Et j'attaque le fond ... en faisant le tour de tous les flecos ... premier jet au pastel noir et au fusain naturel (pour ancrer (encrer ?) le pigment dans la structure granuleuse du papier)


Le fond noir c'est bien, mais c'est plat ... je rajoute du contraste avec du bleu (comme je l'ai déjà fait à moult reprises) avec une teinte foncée et une teinte très foncée ... le bleu a l'avantage de donner une impression de profondeur (un objet bleu a tendance à être perçu au-delà du dessin, à l'inverse d'un objet jaune ou blanc qui sera perçu en avant du dessin, alors qu'un objet vert ou rouge sera perçu au niveau du dessin)


Et je finis le fond ... et voilà ;)